ClubEntreprises_Rencontre21022014Le 20 février dernier, Bernard Cazeneuve, Ministre délégué chargé du budget, rencontrait les entreprises de la CCM à la Technopole Montesquieu, sur le thème :

La fiscalité des entreprises et les nouvelles mesures gouvernementales.

Voici le compte-rendu de cette rencontre.

 

Étaient présents :

 

Christian Tamarelle introduit la réunion devant une 50aine de chef d’entreprises et d’élus du territoire en faisant un rapide historique du site de Montesquieu, cette sorte de « Silicon Valley en rase campagne », constituée aujourd’hui de 60 entreprises dans les secteurs de la vitiviniculture, des ecotechnologies, des biotechnologies et du numérique-électronique, réparties sur 45 hectares paysagés. Ce sont aussi 700 emplois rien que sur le site, mais aussi plus globalement, 10 000 emplois sur le territoire de la communauté de communes.

Il rappelle que le site est pionnier en matière de gestion environnementale avec une charte paysagère imposée aux entreprises qui s’installent, une régulation des eaux pluviales et un éclairage public à faible consommation d’énergie.

 

Mr Tamarelle donne ensuite la parole à Gilles Savary, qui introduit brièvement Bertrand Cazeneuve, en rappelant que le ministre connait bien la région puisqu’il fut élève autrefois, de Sciences Po Bordeaux.

 

Christian Cazeneuve confirme ces propos et insiste sur la richesse de compétences de ce territoire. Avant de répondre aux préoccupations des personnes présentes, il souhaite rapidement rappeler quelles mesures gouvernementales ont été prises en faveur des entreprises et notamment, quelles sont les dispositions qui accompagnent le Pacte de responsabilité.

Pour Christian Cazeneuve, le gouvernement « a fait le pari de l’entreprise », parce qu’il n’y a pas de croissance sans entreprises qui se développent et qui trouvent des acteurs publics pour rencontrer leurs projets. Il ajoute que l’entreprise ne peut pas être considérée exclusivement comme un lieu d’accumulation de richesses. C’est aussi un lieu d’innovation, de transfert de technologies. C’est un lieu où les salariés participent à une aventure collective. La condition sine qua non étant la confiance. C’est la raison pour laquelle le gouvernement réfléchit à des moyens de donner à l’entreprise l’espace dont elle a besoin pour pouvoir se développer. Réduire la dépense publique permet de garantir la durabilité de notre modèle social. Les trois piliers de ce pari sur l’entreprise sont : des entreprises qui innovent, des services publics qui bénéficient de cette croissance et un état qui favorise cette confiance.

Un 2e point important au centre des préoccupations du gouvernement est la mise en place de dispositifs pour diminuer le coût du travail et pour maintenir cet objectif avec persévérance. L’idée est de restaurer les marges de l’entreprise. Le CICE, notamment, est l’un de ces dispositifs. Il permet un allègement des charges de 20 milliards d’euros pour toutes les entreprises soumises à l’IS. Les entreprises bénéficiant de ce dispositif peuvent retrouver de la force et de la compétitivité à l’international, et investir. C’est une mesure qui est quasi-immédiate puisque les entreprises concernées vont pouvoir percevoir ce crédit d’impôt dès le 15 mai 2014.

Le Pacte de responsabilité ajoute 10 Milliards supplémentaires d’allègements. Ici, le crédit d’impôt se transforme en allègement des cotisations sociales. Ces mesures sont prises dans l’intérêt de la compétitivité et de l’emploi. D’autres mesures sont également intéressantes dans ce cadre.

Les nouvelles dispositions concernant le régime des plus-values de valeurs immobilières permettent par exemple, d’encourager l’innovation chez les Jeunes Entreprises Innovantes. La réforme de l’assurance-vie facilite l’accès à des placements plus risqués. La réforme des dispositifs d’amortissements bénéficie aux entreprises qui investissent dans la robotique.

En terme de fiscalité, l’action du gouvernement a permis de rompre le rythme des prélèvements supplémentaires qui ont été de 33 Milliards cumulés en 2011 et 2012 et qui sont de 28 milliards avec l’actuelle majorité. Mr Cazeneuve insiste sur le fait que le combat pour les économies est un combat de gestion qui appellera à beaucoup de responsabilités. Il entend poursuivre la modernisation de la fiscalité des entreprises. Pour rendre les entreprises plus efficaces dans la compétition internationale, il s’agit de créer les conditions pour innover, moderniser la fiscalité et stabiliser le paysage fiscal. C’est dans un paysage fiscal stable que les entreprises auront envie de prendre des risques. Actuellement, le nombre de taxes est très important (6,5 créations de taxes/an depuis 97, certaines coûtant plus cher à percevoir qu’elles ne rapportent) : c’est une situation très anxiogène pour les entreprises. Le gouvernement et le parlement doivent donc créer les conditions de stabilisation du paysage fiscal.

Après avoir conclu, Mr Cazeneuve propose aux participants de lui faire exposer leurs préoccupations.

 

1re question

Mr Yves Petitjean : Président de la chambre régionale des Métiers et de l’Artisanat

Nous sommes en zone rurale : que comptez-vous faire pour les plus petites entreprises de l’artisanat qui sont asphyxiées par ces mesures. Et, deuxième question : aujourd’hui, malgré la volonté du gouvernement concernant l’apprentissage, il y a beaucoup de barrières, ce qui fait que les entreprises qui ne veulent plus prendre de jeunes. Les entreprises sont en difficulté et elles ne voient pas le bout du tunnel.

Réponse de Mr Cazeneuve

Le développement du commerce et de l’artisanat dans les zones rurales est un objectif important du gouvernement. Le secteur des métiers de l’artisanat représente l’enracinement local, l’amour pour les choses bien faites, l’exigence, la culture de la formation au travers de l’apprentissage. C’est aussi l’un des secteurs les plus créateurs d’emploi.

Le CICE bénéficie aux salariés des artisans indépendants à l’exception d’eux-mêmes. Le gouvernement réfléchit à la possibilité d’étendre cette mesure aux travailleurs indépendants, car c’est une revendication de nombreuses instances. C’est la volonté du gouvernement, dans le cadre du Pacte de responsabilité, de faire en sorte d’apporter une réponse à cette demande.

Par ailleurs, des mesures importantes ont été prises en faveur de l’artisanat. Notamment, la diminution du taux de TVA sur la rénovation thermique, élargie aux petites réparations. À propos du niveau des charges qui est calculé sur le résultat de l’année précédente, ce qui pénalise les entreprises en difficulté sur l’année en cours : Pour ces entreprises, nous proposons de procéder au calcul des cotisations sur le résultat de l’année en cours. Nous proposons d’échelonner dans le temps, le montant des cotisations retraite de l’indépendant.

Mr Cazeneuve conclut en indiquant que s’il ne peut apporter toutes les réponses aujourd’hui, car les arbitrages ne sont pas encore rendus, les réponses seront données, car des réflexions sont en cours sur ces préoccupations.

 

2e question

Marie Christine Leblanc, dirigeante de A Puissance 3, Vice-Présidente du Club des Entreprises de la CCM

Mme Leblanc salue la volonté de stabilisation fiscale du gouvernement, mais préfère s’abstenir d’applaudir dans l’attente des résultats.

A puissance 3 est une société industrielle, exportatrice, qui est confrontée au marché international et mondial, en France et à l’export. La compétitivité est très forte sur les marchés à l’international et A Puissance 3 est confrontée à la grande disparité en matière fiscale et sociale. M.C. Leblanc insiste sur cette position d’injustice. Un autre point soulevé par Mme Leblanc concerne les marchés d’investissement industriel. La situation est difficile en France, car les industries investissent peu dans leur outil ce qui affaiblit la compétitivité. Il faudrait une incitation à l’investissement. Les mesures en faveur de la robotique évoquées précédemment sont très intéressantes, mais qu’en est-il de dispositions fiscales et budgétaires pour encourager l’investissement ?

Réponse de Mr Cazeneuve

Le ministre reconnait que ces questions sont très importantes et qu’il faudrait beaucoup de temps pour en étudier tous les contours. Il confirme que la concurrence repose sur une harmonisation fiscale et sociale, dans un premier temps au niveau de l’Union Européenne. L’étape préalable est déjà de nous entendre entre nous, puis de passer à l’échelle mondiale.

La loi Sapin propose une avancée dans ce domaine puisque l’objectif est de ne pas continuer à employer en Europe des salariés à des conditions engendrant une concurrence déloyale. En Irlande, par exemple, le taux d’IS est de 12 % ; et ce n’est pas le seul pays dans ce cas, alors que ce sont des pays qui ont été aidés, en leur temps, par la France. Cela crée des éléments de distorsion. Il n’y aura pas d’Europe sans harmonisation fiscale et sociale. Le gouvernement entend continuer à travailler sur ce point.

Concernant l’investissement, Mr Cazeneuve est d’accord sur le fait que la croissance passe par l’investissement industriel.

L’investissement public dans ce domaine, représente 67 % de l’investissement en France. Le CICE, par exemple, est un dispositif qui permet d’investir. Il offre aussi une stabilité fiscale importante. Tout est fait pour financer l’investissement, par exemple, l’accès aux fonds propres par les entreprises. Beaucoup de choses sont faites, mais le gouvernement est conscient que ce n’est pas encore suffisant et que beaucoup de travail reste à accomplir.

 

3e question :

Frédéric Conchy d’Exosun

Exosun est une entreprise qui investit beaucoup dans l’innovation, présente à l’export et qui a quelques réalisations en France. L’Ademe est récemment entrée dans le capital d’Exosun pour l’aider à se développer en France. Exosun vient de gagner un projet de 10 millions d’euros aux États-Unis. La problématique d’Exosun aujourd’hui est la trésorerie. La Coface n’est pas capable de soutenir Exosun pour répondre à ce projet. Y’a-t-il donc des secteurs qui peuvent être considérés différemment par les organismes de contre-garantie ? Car le passage est difficile pour devenir une ETI de demain.

Réponse de Mr Cazeneuve

Exosun est une entreprise qui visiblement témoigne d’un grand savoir-faire pour qui l’exportation est essentielle. Mr Cazeneuve précise qu’il a aperçu les installations de panneaux solaires à l’entrée de la Technopole. Une réflexion est menée avec Mme Bricq, ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie, afin que l’argent public soit affecté de manière optimale. Le gouvernement réfléchit à des dispositifs de garantie pour accompagner la filière d’excellence à l’exportation. Concernant la politique énergétique franco-allemande qui est le fleuron du commerce européen : il s’agit d’offrir davantage de moyens aux entreprises qui relèvent de ce secteur, de moderniser les moyens d’accompagner les entreprises sur les secteurs les plus porteurs. Mr Cazeneuve indique que la réflexion est en cours et qu’il est trop tôt pour conclure.

 

4e question :

Mr Philippe Anglade, expert-comptable

Pour Mr Anglade, le CICE est une des meilleures mesures de ces dernières années. Mais il y a un paradoxe dans son application. Pour être plus compétitives, les entreprises doivent faire preuve d’excellence. Cela impose d’embaucher des personnes d’un haut niveau et leur rémunération est à la hauteur de leur savoir-faire. Plafonner à 2,5 fois le SMIC est donc dommage, car on ne pas se différencier en embauchant une personne qui débute ou d’un niveau de qualification peu élevé.

Réponse de Mr Cazeneuve

Le ministre confirme que deux réalités s’entrechoquent :

Si on veut favoriser l’emploi ou le développement de l’emploi, toutes les études montrent que les mesures d’allègement sur les bas salaires sont plus favorables à l’emploi que tout autre dispositif, y compris pour les JIE.

Si on veut favoriser la compétitivité, il faut aller au-delà, c’est d’ailleurs la conclusion du rapport Gallois. C’est tout le débat en cours qui ne peut pas être tranché ici. Comment favoriser à la fois l’emploi et la compétitivité ? Il s’agit sans doute de placer le curseur au bon endroit.

 

En conclusion, Mr Cazeneuve insiste sur l’intérêt du débat, mais aussi sur le fait que pour moderniser l’économie, il faut éviter de perdre du temps dans des débats tumultueux.

 

Catherine Marquèze

Article écrit par Catherine Marquèze

Un point – Conseil en communication écrite, écrivain public

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